et tout le reste...
Ce n'est pas que je soie une fan de harira (je ne crache pas dans la soupe, n'est-ce pas), je ne nie pas non plus la valeur sentimentalo-spirituelle du partage de dattes avec de parfaits inconnus, lorsque le canon retentit au crépuscule: le gosse dont la seule famille est Max, le caniche chauve, les deux filles à la grosse poitrine qui veulent des abats pour le ftour, la Marocaine qui guide trois italiens d'une beauté insolente pour le mois sacré, les garçons du café qui se relaient pour venir voir si on a besoin de quelque chose. Mais au fil des dattes, des boissons et des clopes, les langues se délient. Et ainsi commence mon spectacle favori du Ramadan: la caméra cachée de Najlae.
J'ai droit à des fawazir personnelles. Des légendes, des histoires de mort, d'amour, de vengeance, de dépit, de regrets, que je fais passer avec mon thé.
Je suis une fine manipulatrice, je le dis sans honte. Je pose deux grammes de questions qui nécessitent des heures de réponse. Et je m'aperçois que mes interviewés préférés sont réellement mes collègues: cameramen, ingénieurs de son, assistants. Ils ont cousu les douars du Maroc en voiture, les montagnes à dos de mulets, les villes à pied. Ils ont vu les misères, les handicaps, les corrompus, les cellules de prison.
J'adore écouter Miloud, qui nous raconte son passage par l'armée, du temps où ils ont construit "le mur", là-bas dans le Sud. La chaleur seule a droit à une heure de description, le travail une soirée et la vie en caserne des jours et des jours de contes incroyables. Je lui demande toujours de me répéter la nuit où celui qui était de corvée de cuisine a confondu un bidon d'eau avec un bidon de kérosène et qu'ils ont quand-même mangé la popote au goût de fuel.
Mais tout le monde n'a pas fait le légionnaire. Alors d'autres ont des histoires non moins passionnantes. Jalal est intarissable sur ses enfants, un vrai papa-poule qui fait la lecture avec sa fille par téléphone, prend de leurs nouvelles régulièrement, leur parle comme un pote. Jalal, ce grand ours en peluche sur lequel je m'appuie en descendant une pente abrupte, ce grand frère qui sait ce que j'aime manger et fait les courses pour moi à la patisserie, cet expert en communication avec les "autorités locales" (nous dirons comme ça). A lui seul il est une légende.
Les cigarettes sont grillées sous le ciel de Marrakech. Les tajines sont gaiement partagés. Et les contes égrenés comme un chapelet de prières, de fierté et de gratitude. Et ça, c'est la baraka de
شرك الطعام
في سيدنا رمضان
9 comments:
Ramadan 2006, j'ai l'impression de l'avoir passé à Téhéran ou à Mogadiscio... Un coup c'était un espèce de pensionnat de jeunes filles auxquelles un ministre offrait gracieusement le ftour, un coup c'étaient des vieillards croûlant sous le poids de la misère et de l'amertume que je visitais pour une rupture de jeune express - Oui, il fallait bien que j'aille torcher le sujet en vitesse - Y a eu aussi les subsahariens, les enfants inadaptés... et, bien entendu, la grande famille de la télé, sous la tente caïdale... Voilà que je me prête au jeu des réponses sans même que l'on ait à me titiller à coup de questions insidieuses :P
Bon courage, miss ! Bisounoursinette
Partager le sel, oui mais une popote au gout de fuel : il faut voir :). Le bidasse préposé à la corvée était-il enrhumé ? parce que le kéroséne sent fort quand meme !
Merci pour la caméra cachée.
n'empeche...j'adore ton style!
foulla
sana,ntiya be3da ghir jawbi 3la tilifoune a lalla! dois-je t'appeler de mon portable pr que tu réagisses? xx
dima, peut-être qu'il était enrhumé. en tous cas,eux avaient trop faim pour attendre un plan B.
foulla, et toi tu es toujours trop gentille :)
Naj, pour voir le coté zwin de ton Ramadan transnational multirégional, nos chères chaines TV ne nous offrent pas grand chose comme programmes "spécial ramadan". Tes fawazir et caméra cachées sont MYA FLMYA plus interessantes ^-^
Oui, oui, je recommande fortement l'utilisation des portables ! La fameuse combinaison que tu composes pour avoir de mes nouvelles me donne l'urticaire ! On sait jamais sur quelle catastrophe on peut tomber - Je ne parle pas de toi :P -
Je peux partager avec vous ?
a7inou ayedane li khobzi omi.
kaoutar, au royaume des aveugles le borgne est roi? :p
sana, encore heureux que tu parles pas de moi! ok, call u soon ;)
7didane, mrahba. mrahba.
Cool... Tu vois pourquoi je préfère tjrs le terrain... Monsef
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