Il y avait ce vent des steppes skhiratiennes. Le bout de mon nez était assorti à mon écharpe. J'avais autrement imaginé mon dimanche après-midi que cette congélation qui me rappelait les filets de maquereaux dégueulasses dans le supermarché de Berkeley.
On marchait emmitouflés dans nos manteaux. Nos baskets aux pieds. Deux gendarmes sur de magnifiques chevaux noirs nous toisaient. L'eau était boueuse, l'île verdoyante et nos pieds s'enfonçaient dans le sable. Au loin, mille tempêtes faisaient écho à nos volcans intérieurs.
Tiyara dormait quand on est arrivés. Il s'est longtemps brossé les cheveux sur le seuil de sa porte. Je ne savais pas qu'il avait emménagé dans des toilettes. Je feins la normalité de la situation. On se pose sur des rochers artificiels. On parle de ceux d'ici et de là-bas, de nous, d'hier, de demain. Tiens, hier, Tiyara a compris pourquoi Dieu l'avait assigné à glandouille longue durée dans l'isolation du ici. Il fumait peinard. Un Américain mal rasé suivi d'un colosse demande s'il peut jouer au volley dans le petit terrain aménagé en face. Tiyara acquiesce. Nom d'une pipe! C'est bien Leonardo Di Caprio? Il secoue la tête. Le dernier joint date d'il y a quelques jours, il ne rêve pas. A deux mètres de lui, Titanic-man, en tournage à Rabat pour quelque temps, a loué une baraque face à la mer. Là, il joint les deux mains pour recevoir le ballon. Le bodyguard garde l'oeil bien ouvert. Tiayara et son sourire, je les vois d'ici! Il a attendu sagement la fin de la partie. Il a gentiment demandé à prendre une photo avec Leo, ou même deux, avec son portable. Il lui a parlé un peu. Le bonhomme était gentil. Dommage que les photos aient été prises après le coucher du soleil sinon on les aurait imprimées sur des tee-shirts, des maillots, des serviettes de plage! Ça nous a réchauffés, cette histoire. Mais moins que les horizons turquoises d'un désir vieux de dix ans.
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