Sunday, July 30, 2006

Migraine [fiction]

Je me suis fait peur aujourd’hui. Je me suis convaincue que c’est cette migraine incessante qui m’a rendue si irritee a la vision de tous ces couples. J’ai feint le bonheur de voir tant d’amour autour de moi, toutes ces paires d’humains, des gros, des maigres, des blonds, des asiatiques, des Francais, des noirs, a se becotter, se caliner, se caresser, devant mes yeux. Meme la plus moche, meme le plus poilu, avait quelqu’un a ses cotes, quelqu’un a regarder avec ces yeux-la, quelqu’un avec qui partager son cookie, quelqu’un au creux duquel se nicher, avec qui partager sa bouteille d’eau, avec qui partager sa deception, ou sa joie. Ou ne rien partager. Mais avoir le choix.
Je ne connais plus ce sentiment. Etre deux. Compter pour deux, marcher a deux, faire les courses a deux, se retourner et sentir la presence de quelqu’un d’autre contre soi.
Je ne regarde plus personne, avec "ces yeux-la".
Je ravale ma rage que tous les magnifiques adjectifs que l'on me colle d'habitude restent au stade d'adjectifs. Je cale la rage bien au fond de moi-meme, puis je souris. Toujours ce stupide sourire, cette grimace de trois secondes le temps qu’on comprenne que “je suis heureuse pour vous, mais moi, je suis celibataire et contente de l’etre”. Rien n’est plus faux.
Je compte les jours depuis que c’est fini entre nous. C'est tout con comme le souvenir d'une chanson, d'un vetement, d'un parfum, peut vous ratatiner le moral.
J'evite certains endroits, pour m'eviter de me crisper, de me rememorer que c'etait hier. Juste hier. Comment c'est, deja? Cette excitation? Comment c'est, les yeux qui fixent un detail du corps, du visage? Une cicatrice qu'on se surprend a aimer, une odeur qui sonne comme un chemin familier, un cil qui sort du rang, une bouche qu'on connait, dent par dent.
C'est comment deja, les veines de tes bras? Et tes cheveux sur la nuque?
C'est comment deja, ta manie de mettre du sel sur tes tranches de pasteque?

Rien que d'y penser, j'ai encore plus mal a la tete.