Monday, November 21, 2005

Sous presse

Je ne sais plus quoi penser de la presse au Maroc. Non pas que la presse américaine me laisse rêveuse. Loin de là! Elle est pourrie, pourrie. Mais en me penchant sur celle du Maroc, je me dis qu'il faut stopper la gangrène, quitte à l'amputer d'une jambe.
Cette semaine donc, comme chaque mois de novembre que dieu fait, il y a une journée de la presse au Maroc. L'occasion de se retrouver sur les fauteuils rouges du théâtre Med V (et plus récemment le palais de congrès de Skhirat) pour célebrailler, remettre des prix à des voix oubliées, des plumes moisies, des pionniers non suivis.
L'article du Matin disait "le hasard a voulu que la majorité des candidats soient des candidates". Quelle joie, quel accomplissement miraculeux! Un véritable déferlement de plumes au féminin. Les lauréats étaient finalement Chadwane Bensalmia de TelQuel (prix largement merité, GO CHAD!) et Nadia Ben Sellam d'Al Alam, Lamia Daka et Hassan Harmas de la MAP, Soumya Dghoughi, de 2M, Houri Fatima de la RTM et Noureddine Benhoucine, de Rissalat Al Oumma. Le Journal a probablement boycotté le prix.
Inconnus au bataillon? Sans blague.
Pour ceux qui ne le savent pas encore parce qu'ils vivaient sur une autre planète, personne ne lit la presse au Maroc. Je dis bien personne***. Le meilleur hebdomadaire vend 10 000 copies, une vraie misère. Je dis toujours à mon père qu'ils devraient lui donner le prix du "supporter de la presse marocaine" parce qu'il revient chaque matin avec au moins cinq sous le bras. Je suis en colère quand il achète L'Opinion. Il me répond "wa msaken, c'est juste pour les encourager". J'en suis encore plus en colère. La presse qui vit de charité, pas de mérite.
C'est un cercle vicieux: ceux qui lisent achètent en gros plusieurs journaux (disons TelQuel, Le Journal, Maroc Hebdo, Al Ahdate). Ou bien (l'economiste, Economie et Entreprises, La Vie Eco) ou bien (Al Ayam, Assahifa, Assabah (a cause de Ninni).
Combien ont lu l'article de Nadia Ben Sellam sur l'autopsie? Combien ont ecouté Houri Fatima? Combien ont vu les photos de Benhoucine? Je prends les paris.
La presse partisane est morte. Hier. Avant-hier. On la maintient avec un tube de respiration qui ne sert a rien.
Tous ces journalistes payés une misère, produisant des articles de misère dans des journaux de misère. Quel gâchis...
On a la presse qu'on mérite, oui. Mais jusqu'à quand?
Quand on se dit qu'un journal comme La Nouvelle Tribune doit vendre quelques 300 à 500 numeros par semaine, on se pose des questions. Ah, vous n'avez jamais entendu parler de Rissalate Al Oumma? Ou vous ne saviez pas que ça existait encore? Moi non plus.
Peu de journaux sont membres de l'OJD, organe de justification de diffusion qui oblige les media à publier leur comptabilité et leurs chiffres de vente. Pour beaucoup de journaux, les fonds sont occultes, on ne sait comment ils survivent. Entre alors en jeu tout un aspect politique: les partis, l'armée, les armateurs, les businessmen, etc. Sans parler de tout l'aspect professionnel: salaires, indemnités, assurance, retraite. On attend toujours le consensus pour une convention collective entre le Syndicat National de la Presse Marocaine (SNPM) et la Fédération marocaine des Editeurs des Journaux (FMEJ).
Il y a des semblants de stars qui émergent. L'émission "Grand Angle" de Reda Benjelloun est appreciée, les chroniques de Rachid Ninni, certains articles de TelQuel, des dossiers du Journal (il y a bieeeen longtemps), des ébauches d'enquêtes en arabe. Il nous manque encore un quotidien fort, en arabe ou en français (et en tamazight bon sang). Il nous manque des journaux de proximité (n'est-ce pas nounours?). Il nous manque l'éthique. Il nous manque les moyens. Il nous manque des lecteurs. Il nous manque une bonne génération de professionnels. Ca commence. Je suis confiante. Ca va venir. Je m'impatiente, voila tout.




*** Qui lit d'ailleurs? Pour les alphabetises, ne pas rater l'article de Jihane, intitule «Education pour tous 2006» : Le Maroc parmi les pays regroupant les 3/4 des adultes analphabètes"

5 comments:

Loula la nomade said...

Situation des plus déplorables. Nulle part ailleurs que comme chez nous.
Bon, ton article est-il en ligne oulla mazal?

Najlae said...

ben non figure-toi! J'en ai parle ce matin et on m'a dit que ct pour next week. suis decue mais bon..

Loula la nomade said...

Et viva......

Amine said...

Loula>... España!... euh non, Marruecos!!!!!!!

C juste que franchement, je n'arrive pas trop à être optimiste avec tout cela...
La gangrène à l'origine de tous nos maux, c'est l'analphabétisme...
on a encore 2/3 générations à sacrifier avant de voir un Maroc à la hauteur des espoirs de ses citoyens...

Dis, Miss Pullitzer, et avec tout ça, tu eveux quand même rentrer?? Bien courageuse... je serais toi, je globetroterrai plutôt entre la Bosnie et Berkley encore un bon moment... up to you..

A chaque fois ke je me rappelle ces chiffres sur l'analphabétisme de mon pays, ça me déprime, et je me rends compte Oh Combien G été privilégié d'aller à l'école...

Anonymous said...

bonsoir najlae,
la presse marocaine s'en va en reculant et tte personne qui veut y travailler serieusement a ttes les barriéres possibles face à elles.
figures toi qu'il y a des rédactions où les directeurs interdisent à leurs journalistes de se présenter au prix de la presse, ce qui est à mon avis une honte venant du monde de la presse. tt en sachant que c symbolique.